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Page:Belloy - Christophe Colomb et la decouverte du Nouveau Monde, 1889.djvu/176

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clin d’œil, font d’une pauvre bourgade un lieu enchanté, je n’en sais rien, mais on les trouve.

Colomb, au débarqué, marcha jusqu’à l’église sur des tapis de fleurs, de genêts et de lauriers-roses, sous des guirlandes de feuillages, sautant de terrasse en terrasse.

Mais ce qui toucha le plus Colomb, ce fut l’ivresse de reconnaissance qu’il voyait éclater dans tous les yeux. On savait déjà par quelle disposition expresse il s’était efforcé de rendre à la petite cité tous les enfants qu’il lui avait enlevés, bien malgré elle, on s’en souvient. Tout ce que la Niña en avait pu porter, il les lui avait laissé prendre. Le reste, en très petit nombre, avait pris passage sur la Pinta. Or, pendant le temps même qu’on chantait le Te Deum à l’église et sur les parvis extérieurs, car ce jour-là l’église se trouva trop petite, la Pinta, elle aussi, mouillait dans le port, et, de tout son équipage, un seul homme manquait à l’appel et y manquait volontairement. Cet homme, qui était pourtant de Palos, c’était le commandant de la Pinta, l’infidèle, et déjà nous pouvons dire l’infortuné Alonzo Pinzon, qui, du plus loin qu’il eût aperçu la Niña rendue avant lui et portant pavillon amiral, s’était fait débarquer, et avait pris la fuite à travers champs. Ce parti honteux était le seul qui pût momentanément le soustraire au juste châtiment que méritait sa trahison.

À peine, en effet, avait-il eu pris terre au golfe de Biscaye, après cette tempête où il ne doutait pas que n’eût péri la petite Niña, qu’il avait adressé aux deux rois une lettre de notification, où il s’attribuait tout l’honneur des découvertes de Colomb. La réponse foudroyante qu’il reçut de la cour, peu de jours après avoir