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Page:Belloy - Christophe Colomb et la decouverte du Nouveau Monde, 1889.djvu/78

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publique. Le roi et la reine lui marquaient en outre une réelle bienveillance, et ses juges eux-mêmes, tout en combattant ses idées, avouaient ne résister qu’avec peine aux séductions de son éloquence.

Ils ne lui opposaient, du reste, que des opinions incohérentes, des préjugés déjà dépassés de leur temps. Les uns traitaient de rêverie l’existence d’un hémisphère où les hommes et les animaux auraient dû marcher la tête en bas et les pieds en l’air, D’autres, en admettant la sphéricité du globe terrestre, y voyaient un obstacle insurmontable, sinon à l’aller, du moins au retour de l’expédition projetée.

Il était plus aisé à Colomb de répondre à de telles objections que de persuader des juges dominés en secret par la question d’opportunité. La guerre, en effet, venait de reprendre une activité nouvelle, et cette fameuse assemblée, réunie avec tant de peines, se sépara sans avoir rien conclu.

Les deux rois, néanmoins, se tenaient pour suffisamment édifiés. Colomb avait acquis près d’eux une importance morale, qui s’accrut, pendant les années suivantes, de la part qu’il prit, en ingénieur et en soldat, à la guerre sainte.

Ce fut au siège de Malaga que, servant pour la première fois sous les ordres de Leurs Altesses, il vit l’héroïque Isabelle, revêtue de son éblouissante armure, et, telle qu’un archange, brandissant cette épée moins arme que symbole, qu’on admire aujourd’hui encore à la Armeria Real de Madrid. Sur la lame est incrusté le nom du célèbre armurier Antonius, et sur la garde on lit, d’un côté : Je désire toujours l’honneur, et, de l’autre : Maintenant je veille, paix avec moi.