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Page:Bentzon - Yette, histoire d'une jeune créole, 1880.djvu/268

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HISTOIRE D’UNE JEUNE CRÉOLE.

cité de ses manières de l’autorité qu’on lui donnait sur celles qui la veille encore étaient ses camarades ; mais, en même temps, elle imposait par un sérieux sans mélange d’affectation ni de pédantisme. La peur de lui faire de la peine eût suffi d’ailleurs à rendre dociles les plus indisciplinées.

« Oui, continuait Mlle Aubry, cette petite m’apprend un coin de mon métier. Elle me prouve qu’on peut tout obtenir par l’affection. J’ai toujours craint de me montrer faible, ce qui fait, qu’on a pu me croire dure et que j’ai souffert de cette injuste opinion. À l’âge de Yette, je me suis trompée sur l’attitude à prendre une fois pour toutes, je m’en rends compte un peu tard. Qu’en dites-vous ? Si je m’associais cette jeune fille par la suite ? Elle me serait un auxiliaire précieux, et je laisserais ma maison en bonnes mains. »

Yette, cependant, marchait d’un pas ferme à la conquête de ses diplômes. Trois années se passèrent à les réunir, trois années de travail tel que Cora lui disait parfois en s’étirant les bras :

« Tiens ! cela me donne une courbature de te regarder faire seulement !

— Si cela pouvait te donner plutôt un peu