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Page:Bentzon - Yette, histoire d'une jeune créole, 1880.djvu/269

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LES RÊVES DE YETTE.

d’émulation, l’envie de travailler à ton tour ! répliquait Yette en hochant la tête.

— Dis tout de suite de t’imiter ! répondait Cora. N’y compte pas. Je t’admire, c’est bien assez ! »

Et Cora reprenait la position horizontale qui était son attitude favorite, fermant les yeux pour se persuader qu’elle était dans un hamac sous les palmiers de sa chère Martinique. Il n’y avait d’agile dans toute sa mignonne et indolente personne que les mains ; elle jouait du piano en véritable artiste, et, comme sa voix promettait d’être belle, on avait lieu d’espérer qu’elle ferait un jour grand honneur à son maître de musique, le seul de ses professeurs qui eût jamais été content d’elle, car ce bengali n’avait de facultés remarquables d’aucune sorte quand il s’agissait d’autre chose que de gazouiller. Yette s’en rendait compte et s’en inquiétait.

« Que deviendrais-tu si je te manquais ? disait-elle à Cora pour la décider à sortir de sa paresse.

— Tu ne me manqueras jamais ! s’écriait la jeune créole en se jetant au cou de sa grande sœur avec un frisson et un sanglot.

— Mais, chérie, nous avons déjà vu combien la mort est proche et comme elle vient nous sur-