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Page:Bentzon - Yette, histoire d'une jeune créole, 1880.djvu/46

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HISTOIRE D’UNE JEUNE CRÉOLE.

suis bien loin de ses espiègleries du moment. Je vois le jour où elle sera grande, riche, heureusement mariée ; je regarde le lointain brillant, mais incertain, sans m’apercevoir du caillou trop réel sur lequel je puis butter avant d’être arrivé au bout de ma tâche.

— Nous en sommes tous là, dit le curé avec bonté. Je sais ce que vous valez, mon cher ami. Aussi suis-je bien sûr que vous prendrez sans retard la résolution courageuse que l’intérêt de votre fille vous commande. Yette est un diamant… mais un diamant brut comme il n’est pas rare d’en trouver chez nous ; malheureusement nous n’avons point ici le secret de les polir, de leur donner toute leur valeur. Écrivez, je vous en prie, à votre digne ami Darcey. Il n’est que temps. »

M. Darcey était un riche banquier, copain de collège de M. de Lorme, et qui, malgré une séparation de vingt années, était resté lié avec lui d’amitié presque fraternelle. Ils s’écrivaient fréquemment ; M. Darcey avait rendu plus d’un service à cet ancien camarade qui portait aux nues son mérite. La lettre que M. de Lorme adressa, d’après le conseil du curé, à son ami de Paris, renfermait la vérité tout entière sur le