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Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 1, 1911, 3e mille.djvu/232

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VIII

LES CINQ MILLIARDS


À ceux qui regrettent l’Empire, comme à ceux qui maudissent encore la Commune, il convient de mettre peut-être sous les yeux un petit tableau officiel, et maintenant historique, du bilan véritable de nos désastres. Je l’ai trouvé, au hasard de mes lectures, dans un vieux numéro de la Revue des Deux Mondes, et, pour préciser, dans celui du 15 février 1875.

Comme tout le monde, et depuis trente-sept années, j’avais toujours cru et écrit que les frais de la défaite s’arrondissaient aux cinq milliards, d’ailleurs légendaires, auxquels Bismarck l’avait taxée et qui furent, ainsi qu’on sait, couverts quarante fois par l’enthousiasme national d’un emprunt où le capitalisme décrocha son Austerlitz. Cette somme en démence de cinq milliards qui devait être payée en espèces « sonnantes et trébuchantes », comme on dit chez les notaires, débordait le concept numérique des plus forts en chiffres de la bohème ternoise. Nous n’arrivions pas à l’imaginer, ni en hauteur ni