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Page:Berlioz - Les Grotesques de la musique, 1859.djvu/267

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cready et les premiers acteurs des trois royaumes ; et nous avions des vertiges d’admiration.

Nous avions, en outre, organisé une bande de siffleurs, de hueurs et de conspueurs, pour interdire les symphonies dans les entr’actes du Théâtre-Français, les couplets ou les ouvertures dans les vaudevilles ; et au bout de quelques soirées orageuses, où force était restée au bon sens et au bon goût, on avait définitivement reconnu impossible la continuation de ces horribles stupidités ; et l’art musical n’avait plus à subir de pareils outrages.

À ce moment-là j’ai été réveillé en sursaut ; on venait me chercher de la part du comité de l’Association des artistes-musiciens pour travailler aux préparatifs d’une fête dansante que la Société s’est un instant proposé de donner dans le jardin Mabille, sous la direction de Musard, et avec le concours de toutes les Lorettes de Paris. Le contraste de mon rêve et de cette réalité m’a paru si excessivement bouffon que j’en ai ri jusqu’aux spasmes, et que je suis resté dans les dispositions d’hilarité avec lesquelles je continuerai ma lettre, si vous le voulez bien. Et vous le voudrez, n’est-ce pas ? Il est reconnu depuis longtemps que nous ne pouvons causer ensemble sans rire ; et si découragé ou si indigné que je sois,

Mon chagrin disparaît sitôt que je vous vois.

Quel changement ! Vous rappelez-vous le temps où vous m’éreintiez avec tant de plaisir dans vos feuil-