Page:Berlioz - Les Grotesques de la musique, 1859.djvu/289

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vous inquiétez pas de cela néanmoins, j’en fais mon affaire. »

Quand nous en vînmes le lendemain à répéter le morceau : « Apportez la harpe ! » cria Georges en quittant son violoncelle. On lui obéit ; il s’empare de l’instrument, sans s’inquiéter des brocards et des éclats de rire qui partent de tous les coins de l’orchestre (on savait qu’il n’en jouait pas), il enlève tranquillement les cordes voisines de l’ut et du si, et, sûr ainsi de ne pouvoir se tromper, il attaque ses deux notes avec un à propos imperturbable, et la Marche des pèlerins se déroule d’un bout à l’autre sans le moindre accident.

C’était la première fois qu’il m’arrivait d’entendre cette partie exécutée ainsi à la première épreuve. Il fallait, pour être témoin d’un tel phénomène, qu’elle fut confiée à un harpiste qui n’avait jamais essayé de jouer de la harpe, mais qui était sûr d’être musicien.

J’ai parlé plus haut des académies de chant de Lyon : l’une de ces sociétés, peu nombreuse, se compose seulement de jeunes amateurs allemands qui ont importé à Lyon les traditions de leur patrie, et se réunissent de temps en temps pour étudier avec soin les chefs-d’œuvre qu’ils admirent. Ces messieurs appartiennent presque tous à des maisons de banque ou du haut commerce de Lyon. Ils me vinrent en aide avec beaucoup de bonne grâce et me furent d’un grand secours. J’en dois dire autant de l’autre société chorale. Celle-là est très-