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Page:Bernard - Federic de Sicile.djvu/65

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venoit de luy dire mille choſes tendres, comme le plus traitre de tous les hommes ; ſa jalouſie produiſit en cét inſtant un effet tout contraire à ce que la premiere avoit fait ; elle luy redonna toutes ces forces par l’ardeur de ſe vanger. Cependant elle eſtoit aſſez embarraſſeé : l’idée d’une beauté qui luy enlevoit le cœur de Federic, & qu’elle eſtoit ſi peu ſeure de trouver, la geſnoit terriblement ; en penſant haïr Federic, elle ne s’apperçevoit pas qu’elle haïſſoit toutes les Dames de la Cour, de peur de ne pas haïr celle qui cauſoit ſon inquietude. Il n’y en avoit point qui ne luy donnaſt une peine ſecrete, elle vouloit, & craignoit en même temps de trouver ce qu’elle cherchoit, & montrant l’élegie à toutes les Dames, avoüez, leur diſoit-elle d’un ton railleur, avoüez qu’on eſt bien-heureuſe d’inſpirer des ſentimens ſi delicats à un Prince auſſi ſincere que Federic ; puis voulant lire dans leurs yeux ce qu’ils avoient dans l’ame, elles les examinoit avec une attention la plus inquiette du monde. Pluſieurs lurent l’élegie ſans s’y connoiſtre ; on avoit eu ſi peu de froideurs pour