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Page:Bernard - Federic de Sicile.djvu/91

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que je ſerois contente ſi je pouvois m’attirer un peu de cette colere, qui me paroiſt ſi obligeante ; n’en faites point l’épreuve, luy diſoit-il bien froidement, helas ! repondoit-elle avec une triſteſſe extréme, c’eſt plus pour mon intereſt que pour le voſtre, que je ne vous dois point negliger, vous m’aimez ſi peu quand je vous aime, que la moindre froideur de mon coſté me donneroit toute la voſtre ; mais il faut l’avoüer, j’eſſayerois inutilement d’en prendre, & je ſens bien qu’il me ſeroit autant impoſſible de meriter voſtre emportement, qu’à vous de me l’accorder, ah ! Federic, vous ne m’aimez plus, ou vous ne m’avez jamais aimée, ma paſſion croit toûjours & la voſtre s’affoiblit. En effet, c’eſt bien diminuer en amour que de n’augmenter pas. D’ailleurs la Princeſſe de Majorque dans les commencenens de ſa tendreſſe avoit ſi ſouvent balancée entre la crainte d’avoir une rivale, & l’eſperance de n’en avoir point : que ces ſentimens tumultueux l’aveugloient ſur ceux de Federic, & l’empeſchoient en quelque façon de s’apperçevoir de leur len-