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Page:Bernier - Ce que disait la flamme, 1913.djvu/443

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contenir l’élan d’un pouvoir soudain, irrésistible au plus vivant de son être : il s’agite en lui non de l’égoïsme seul, une passion extrême à laquelle il est malgré lui docile ou même une crainte d’être lâche envers la jeune fille, mais un enthousiasme bizarre, moins vague à chaque seconde, le pénétrant davantage et de lumière et d’énergie. D’une vie sourde et constante, l’idée patriotique en lui s’était développée, affermie : la conviction n’était plus seulement idéale, mais impatiente d’agir. Elle vient de s’émouvoir : une tâche lumineuse éclaire l’esprit de Jean, le sollicite à la décision, à la volupté d’être fort et d’être bon. Il se souvient de la rêverie intense en face des plaines d’Abraham, plusieurs mois auparavant, de l’ardeur un moment ressentie pour les humbles de la race. Comme il fut naturel alors de l’apaiser sans remords, avec la sécurité de l’égoïsme et de l’indifférence ! Il revient tout-à-coup, mais réel, mais puissant, le désir autrefois méprisé de « répandre le sourire là où il y avait des larmes »… Un autre chagrin l’oppresse : il abandonne le rêve du laboratoire, de la science inspiratrice, glorieuse. Oh ! quelle sincérité, quelle passion déjà l’unissait à lui ! Quelle angoisse de le briser en lui-même ! La volonté fixe est à ce point victorieuse qu’elle détourne sans effort le songe brillant, que la vocation admise