heures. J’ai pleinement savouré chaque minute de cette course, pendant laquelle je concentrais toutes mes facultés pour admirer, et faire aussi la plus grande attention, car le chemin était très-difficile. Je pensais parfois qu’il méritait bien le nom qu’on lui avait donné chez Link. Pendant presque tout son parcours on voit Tarryall-Creek, l’un des grands affluents de la Platte ; il est, de tous côtés, entouré de montagnes qui, parfois, se rapprochent assez pour ne laisser entre elles qu’un canyon très-resserré, et parfois s’élargissent ; il serpente, monte et descend pendant vingt-cinq milles, pour arriver à un parc dénudé et ceint de rochers qu’arrose une rivière rapide et guéable, aussi large que l’Ouse à Huntingdon ; elle est formée par les neiges et bordée de glace. Le parc est entouré de fantastiques collines rocheuses couvertes de neige, qu’égaye seulement un taillis nain de beaux sapins argentés. Jusque-là je n’avais rien vu de si complètement sauvage et si différent du reste de ces contrées.
Je fis une grande ascension parmi des collines jetées à l’aventure ; subitement, de l’autre côté du ravin, surgissant au-dessus de l’herbe ensoleillée et des pins vert foncé, une chaîne de montagnes magnifiques et surnaturelles, d’une forme admirable, élevait ses cimes aiguës et colossales et se détachait en rouge chaud et nuancé sur l’étincelant ciel bleu. Partagée par des ravins profonds, elle se découpait en dents de requin, et projetait de ses flancs inaccessibles de gigantesques protubérances. C’était un spectacle splendide, céleste, inoubliable ; comme ces montagnes que l’on ne voit qu’en rêve, elles semblaient ne point appartenir à notre