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Page:Bird - Voyage d’une femme aux Montagnes Rocheuses, 1888.pdf/204

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VOYAGE D′UNE FEMME

dormir dans un semblable lieu. On me raconta alors une affreuse histoire de crime et de violence. Ce misérable, qui avait choqué même la facile morale du public de l’Alma, avait été prévenu par les surveillants ; l’avertissement avait produit son effet, et il avait émigré au ravin de Hall. Il paraît que les mineurs du ravin étaient résolus à n’avoir point de cabarets ou à en limiter le nombre, et que lorsque ce bandit en établit un, il fut « averti ». Ce semble cependant n’avoir été qu’un prétexte pour se débarrasser de lui, car ce n’était guère un crime dont put s’inquiéter la loi de Lynch. Il fut accablé sous le nombre, et avec des circonstances atroces, jugé et pendu à cet arbre dans l’espace d’une heure [1].

Partie ce matin à dix heures, j’ai passé une journée très-agréable, car les collines me préservaient de l’ardeur du soleil. Je n’ai fait que trente-deux milles, parce qu’il était difficile de marcher sur la glace et qu’il n’y avait pas de forgeron à moins de trente-cinq milles du ravin. Je venais de partir, lorsque je rencontrai deux affréteurs qui me donnèrent la nouvelle fâcheuse qu’il y avait trente milles de glace jusqu’à Denver. « Vous allez faire un rude voyage », me dirent-ils. La route, gravissant et descendant les collines, était entourée en même temps d’une rivière impétueuse et de hautes montagnes. Le paysage était superbe, mais je déteste être enfermée dans ces gorges profondes, et je m’attendais toujours à voir quelque chose d’effrayant remuer parmi les arbres. Après avoir

  1. L’opinion publique approuva cette exécution, qui, pour elle, était le juste châtiment d’une série de crimes.