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Page:Bird - Voyage d’une femme aux Montagnes Rocheuses, 1888.pdf/206

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VOYAGE D′UNE FEMME

force d’être frottées, et, quoique le parquet ne soit pas raboté, il est si propre qu’on pourrait manger dessus. La table est abondante ; la mère et les filles ont beau travailler toute la journée, elles ont l’air aussi soigné que si elles ne faisaient rien, et dans ce moment je les entends rire de bon cœur. Le maître du rancho ne permet pas qu’on apporte de liqueurs chez lui, ni qu’on en boive au dehors, et ne reçoit de voyageurs qu’à cette condition. Les affréteurs vinrent souper bien lavés, et quoique douze d’entre eux aient passé la nuit dans la cuisine, à neuf heures on n’entendait plus un bruit.[1] Après le départ du convoi de marchandises, j’ai déjeuné avec la famille, et au lieu de manger les restes d’un repas, nous avions des mets chauds, servis sur une nappe bien blanche. Les seaux sont en chêne poli, cerclés de cuivre ; les ustensiles de cuisine ont tout l’éclat que peut leur donner le fourbissage, et ce qu’il y a de plus merveilleux encore, les jeunes filles cirent leurs chaussures. Le cirage quotidien est un luxe inusité que l’on ne connaît guère dans les maisons ; depuis deux mois, mes bottines n’ont été cirées qu’une seule fois.

Denver, 9 novembre.

Je ne pouvais pas établir que la supériorité des settlers de la vallée des Daims s’étendit au delà des

  1. Ces affrétements constituent une affaire très-profitable. Le prix est, je crois, trois cents par livre, de Denver à South-Park, où la majeure partie des chargements est placée sur des ânes de bât et transportée aux mines. D’ailleurs, un chemin de fer est projeté.