Aller au contenu

Page:Bird - Voyage d’une femme aux Montagnes Rocheuses, 1888.pdf/216

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
208
VOYAGE D′UNE FEMME

La route suivait le canyon jusqu’aux sources d’Idaho, station à la mode pendant l’été, déserte maintenant ; nous y avons pris un superbe attelage de six chevaux, avec lequel nous sommes arrivés à une hauteur de 10 000 pieds ; une descente de 1 000 pieds nous a amenés à Georgetown, enserrée dans la gorge la plus remarquable qu’il soit possible de choisir pour l’emplacement d’une ville ; au delà, le canyon a l’air fermé par des montagnes inaccessibles et à pic, parsemées de pins jusqu’à la ligne boisée et couvertes d’une légère couche de neige. La surface sur laquelle il est possible de construire est tellement circonscrite et escarpée, les maisons à pignon et non peintes sont si bien perchées de place en place, et l’eau se précipite entre elles avec tant d’impétuosité, que cela me rappelait vaguement une ville suisse. Les plus petites maisons sont étayées d’un côté par de jeunes pins, afin de n’être point emportées par les rafales terribles qui balayent le canyon. C’est la seule ville que j’aie vue, en Amérique, à laquelle on puisse appliquer l’épithète de pittoresque. Cependant, assise, comme elle est, dans ce ravin profond, froid et sombre, entouré de ces alpes sourcilleuses, la situation est terrible. J’y arrivai à trois heures, mais le soleil était couché pour elle et tout était dans l’ombre ; en fait, le crépuscule semblait venir, et comme je n’avais pu changer mes billets circulaires à Denver, j’étais sans argent pour y passer le lendemain. Je craignais donc beaucoup de manquer Green Lake, but de mon voyage. Nous traversâmes une rue irrégulière, étroite, encombrée, remplie de mineurs se tenant par groupes ou buvant et jouant sous