LETTRE XV
Un trappeur, de passage la nuit dernière, nous a
apporté la nouvelle que M. Nugent est malade ; de
sorte que, ayant lavé la vaisselle après notre déjeuner
tardif, je montai à cheval pour me rendre à sa cabin :
je le rencontrai descendant le ravin pour nous venir
voir. Il me dit qu’il avait pris froid dans la « Range »,
et souffrait d’une ancienne blessure de flèche au poumon. Nous avons eu une longue conversation sans
faire allusion à la première, et il m’a raconté quelques-unes des circonstances actuelles de sa vie ruinée. Il est pitoyable qu’un homme comme lui, dans
la force de l’âge, soit privé de foyer, d’amour, et mène
dans un repaire une vie de ténèbres, sans autres compagnons que des souvenirs coupables et un chien, que
beaucoup de personnes pensent être le meilleur des
deux. Je l’ai supplié de renoncer au whisky, qui maintenant est sa perte ; sa réponse avait un triste accent