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Page:Bird - Voyage d’une femme aux Montagnes Rocheuses, 1888.pdf/251

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AUX MONTAGNES ROCHEUSES

voir ce dont il est capable avant de lui donner du travail. Son arrivée ici nous surprend beaucoup. Il paraît arrogant et borné.

Nous avons décidé qu’aujourd’hui est le 26 novembre ! Demain est donc le jour d’actions de grâces, et nous projetons une fête, quoique Kavan m’ait encore dit ce matin, d’un air piteux : « Vous le voyez, c’est une bouche à nourrir. » Le jeune homme qualifié de « bouche » est venu essayer de la panacée du travail manuel, mais il a été élevé à la ville, et je crois qu’il ne travaillera pas. Il fait des vers, et aujourd’hui, tandis que j’étais occupée, il s’est mis à me les lire à haute voix pour avoir mon opinion. Il est à l’âge où tout ce qui est littéraire exerce une fascination, où tout homme de lettres est un héros, surtout le docteur Holland.

La nuit dernière a été effroyable. La tempête soulevait la cabin et la boue du toit se brisait. Le vent nous chassait un gravier fin au visage, et j’ai ce matin enlevé de ma chambre quatre pelletées de terre. Après le déjeuner, Kavan, M. Lyman et moi, avec les deux chevaux du chariot, avons fait, dans un véritable coup de vent, une route de sept milles vers le lieu du désastre d’hier. J’étais comme une servante qui a un jour de sortie, me dépêchant de finir ma vaisselle et laissant ma chambre en désordre. Le chariot gisait à mi-hauteur du flanc d’un ravin, et, retenu par des arbres, il n’avait point été détruit. Il faisait trop froid pour rester là tandis que les hommes le halaient, de sorte que je revins lentement et rencontrai M. Nugent d’humeur très-amère. Il avait presque un « mauvais accès »,