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Page:Bird - Voyage d’une femme aux Montagnes Rocheuses, 1888.pdf/253

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AUX MONTAGNES ROCHEUSES

qui avaient été complètement mouillés par la neige fondue, sont tout gelés par tresses. Le lait et la mélasse sont comme de la pierre ; il a fallu mettre les œufs à l’endroit le moins chaud du fourneau pour les conserver liquides. Deux veaux sont morts glacés dans le hangar. La moitié du parquet est sous la neige, et il fait si froid que nous ne pouvons ouvrir la porte pour la balayer. Ce matin, à huit heures, la neige a recommencé à tomber par flocons fins et pressés, pénétrant par les fentes, recouvrant cette lettre tandis que j’écris. Kavan tient ma bouteille d’encre près du feu, et me la tend chaque fois que j’ai besoin d’y tremper ma plume. Nous avons fait un feu énorme, mais nous ne pouvons élever la température au-dessus de 20°. Depuis mon retour, le lac a toujours été assez fortement gelé pour supporter un chariot, et aujourd’hui il est difficile, en se servant constamment de la hache, de conserver le trou par lequel nous puisons l’eau. La neige peut fondre ou nous bloquer. Nous n’avons d’inquiétudes qu’au sujet des provisions. Le thé et le café iront jusqu’à après-demain ; le sucre vient de finir, et la farine baisse. C’est vraiment grave d’avoir une bouche nouvelle à nourrir ! Or, le nouveau venu est un être vorace, qui, à lui tout seul, mange plus que nous trois réunis. Cela m’épouvante de voir ses yeux affamés mesurer les aliments du déjeuner, et aussi de voir le pain disparaître. Il m’a dit ce matin qu’il pourrait dévorer tout ce qu’il y a sur la table. Il est fou de nourriture, et je vois que Kavan se prive pour faire durer les provisions. Buchan, qui est loin de se bien porter, redoute la perspective de la demi-ration. Tout ceci semble risible, mais nous ne