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Page:Bird - Voyage d’une femme aux Montagnes Rocheuses, 1888.pdf/255

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AUX MONTAGNES ROCHEUSES

fait un gâteau. Hier soir, j’en ai mis la moitié dans le buffet, dont j’ai laissé la porte ouverte. Pendant la nuit, nous avons entendu du bruit dans la cuisine, puis tousser, suffoquer, geindre, et au déjeuner ce garçon ne pouvait avaler la nourriture avec sa vivacité habituelle. Après le repas, il est venu me trouver en pleurnichant, pour me demander quelque chose d’adoucissant pour sa gorge, convenant qu’il avait vu le « gâteau au gingembre », et qu’il avait eu tellement faim pendant la nuit, qu’il s’était relevé pour le manger. J’ai essayé de lui faire sentir qu’il était vraiment honteux de tant manger et de se rendre si peu utile ; il répondit qu’il ferait tout pour m’aider, mais que les autres étaient si durs pour lui ! Je n’avais jamais vu auparavant d’hommes aussi patients avec un jeune garçon. Il est très-ennuyeux pour nous de l’avoir en plus, et cependant nous ne pouvons nous empêcher de rire de lui. Il n’est pas honnête d’ailleurs ; je n’ose laisser cette lettre sur la table, car il la lirait. Il écrit, du moins il le dit, dans deux Revues périodiques de l’Ouest, et nous fait voir de longs fragments de ses poésies qui ont été publiées. Dans l’une (comme me l’a montré Kavan), il y a vingt lignes copiées littéralement dans le Paradis perdu ; dans une autre, se trouvent deux stances de Résignation, où il a seulement mis perdu » au lieu de « mort » ; et il a fait passer comme de lui tout le Meeting-Place de Bonar. Il m’a aussi prêté un essai intitulé La fonction du romancier, qui n’est qu’une mosaïque de citations non avouées par lui. Les hommes m’ont raconté qu’il s’est vanté d’avoir, lorsqu’il s’est arrêté chez M. Nugent