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Page:Bird - Voyage d’une femme aux Montagnes Rocheuses, 1888.pdf/31

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AUX MONTAGNES ROCHEUSES.

Le temps changea, s’assombrit, rougit, s’adoucit, devint de plus en plus merveilleux, tandis qu’il faisait nuit sous les pins, jusqu’à ce que, s’étant fait voir pendant une heure, les pics couverts de pierreries devinrent subitement comme ceux des sierras, pâles comme la mort. Beaucoup plus tard, une froide lumière dorée se traînait à l’est, les pins se dessinant en relief sur sa pureté, et là où avait brillé la lueur rose, se soulevait une lune énorme ; la lumière vacillante des feux de la forêt striait lugubrement, de loin et de près, les flancs de la montagne. Je compris que la nuit était venue avec son étrangeté, et, mettant mon grand cheval au galop, je me cramponnai à lui, jusqu’à ce que je l’eusse arrêté à Truckee, qui était à l’apogée de ses réjouissances du soir. — Les feux brûlaient en plein air ; les bar-rooms et les cafés étaient remplis, les lumières brillaient, les tables de jeu étaient encombrées, le violon, la guitare en affreuse discordance, et l’air résonnait de blasphèmes et d’obscénités.