Aller au contenu

Page:Bird - Voyage d’une femme aux Montagnes Rocheuses, 1888.pdf/68

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
60
VOYAGE D'UNE FEMME

dans une lueur de pourpre. Des chaînes revêtues de pins, s’élevant vers le sommet desséché du Storm-Peak, courent aussi à l’ouest, et toute cette beauté, toute cette gloire, ne sont que le cadre d’où ressort (s’élevant au ciel dans une lueur perlée) le sommet à double cime, solitaire, effrayant, imposant, du pic de Long, le mont Blanc du Colorado du Nord.

C’est un spectacle auquel il ne manque rien. En dépit du docteur Johnson, ces « protubérances monstrueuses enflamment l’imagination et élèvent l’esprit ». Ce paysage satisfait mon âme. Maintenant les montagnes Rocheuses réalisent, dépassent même les rêves de mon enfance. C’est magnifique ; l’air qu’on respire vous donne la vie. J’aimerais à passer quelque temps dans ces hautes régions, mais je sais que l’expédition avortera, à cause de la sottise et de l’entêtement des Chalmers.

Il existe, à une hauteur de 7 500  pieds, un lieu très-romantique appelé Estes-Park ; on peut y arriver en descendant jusqu’aux plaines, puis alors en remontant le canyon de Saint-Vrain. Mais c’est à cinquante-cinq milles, et comme Chalmers était sûr de me faire traverser les montagnes à une distance de vingt milles environ, je suis partie hier dans l’après-midi, avec le ferme espoir de ne pas revenir. Pendant toute la journée de mardi, Mrs Chalmers avait été occupée à préparer ce qu’elle appelait « de la mangeaille » qui, avec une quantité de couvertures, devait être chargée sur une mule. Mais au moment du départ, je m’aperçus avec dégoût que Chalmers était sur ce qui aurait dû être la bête de somme, et qu’on avait placé sous ma