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Page:Bird - Voyage d’une femme aux Montagnes Rocheuses, 1888.pdf/90

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VOYAGE D′UNE FEMME

nuit à Longmount ; je m’étais levée nerveuse et mal à mon aise, prête à abandonner le projet de venir ici, quand le lever du soleil sur les plaines et le rouge merveilleux des montagnes Rocheuses, qui reflétaient le ciel de l’Orient, me donnèrent du courage. L’hôtelier avait trouvé un cheval, mais ne pouvait m’assurer d’une manière satisfaisante que ce fût une bête tranquille. Aussi, très-ébranlée encore par la chute que j’avais faite à Canyon, aurais-je bien voulu que la Greeley-Tribune ne m’eût pas donné la réputation d’écuyère qui m’a précédée ici. Les jeunes gens qui devaient m’escorter « paraissaient très-innocents », m’assura-t-il ; je n’ai pas encore démêlé ce qu’il voulait dire par là. Lorsqu’à huit heures et demie, le cheval fit son apparition dans la rue, je vis avec effroi une bête superbe ; les narines frémissantes, les oreilles et les yeux inquiets. Comme à Hawaï, mon paquet était attaché derrière la selle mexicaine, et mon sac de toile pendait à la fourche. Mais ce cheval n’avait pas l’air fait pour porter des effets, et semblait avoir besoin de deux hommes pour le tenir et le flatter. Il y avait là un tas de fainéants, et je reculai à l’idée de monter avec mon vieux costume hawaïen, quoique le docteur et sa femme m’eussent assuré que je n’avais rien de remarquable. Nous partîmes à neuf heures ; l’hôtelier ne faisait que répéter : « Vous allez être héroïque. »

Le ciel était sans nuage, d’un bleu profond et brillant. Malgré la chaleur du soleil, l’air était frais et réconfortant. Pour sa splendeur et son charme, j’inscrirai cette course à côté d’une que j’ai faite à Hanalei, et d’une autre à Mauna Kea (Hawaï). Je ne tardai pas à