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Page:Blanc de Saint-Bonnet - La douleur, Maison de la bonne presse, 1911.djvu/64

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La douleur met dans l’âme cette intensité si rare qui s’applique ensuite à toutes nos facultés, et qui fait les hommes supérieurs dans les sentiments comme dans les entreprises. Les hommes n’ont ordinairement de valeur que de deux manières : ou ils ont beaucoup reçu de la vertu des ancêtres, ou beaucoup acquis par la douleur. L’intelligence et les grandes vertus se réveillent rarement d’elles-mêmes.

Celui qui a lu attentivement l’histoire des grands hommes peut dire qu’ils n’ont su parfaitement qu’une chose : la douleur. Leur âme, plus profonde, contenait-elle donc la vie à plus haute dose ? Byron fait dire au Dante : « C’est le sort des esprit de mon ordre d’être torturés pendant leur vie, d’user leur cœur, et de mourir seuls. » Et Dante fit lui-même cette belle remarque : « Plus une chose est parfaite, plus elle sent le bien et aussi la douleur. » La douleur, conduisant l’homme plus avant dans l’être, le mène aux grandes choses[1].

  1. Les grands esprits, dans l’antiquité, ont laissé un mot de prédilection sur la douleur : « Il n’y a pas moins de grandeur à