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Page:Bois - Le Satanisme et la magie.djvu/105

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LE SORCIER

d’avoir, sous l’apparence d’un loup massacré et dévoré leurs enfants[1]… Ses songes lui font déjà habiter l’enfer des hommes, prodrome d’un autre enfer. (Voir le chapitre Ier de la IIe partie, Le Sabbat.)

Refoulé hors de l'humanité et n’ayant su devenir le Surhumain, il se résout à son rôle de « Soushumain ». Il s’assied au rang des bêtes, qu’il aime et qui le comprennent ; que de fois le sifflement de ses dents rêveuses groupa autour de sa marche l’inoffensive horde de serpents, surgis de retraites imprévues. La légende populaire de la sorcière avec son chat, du sorcier avec ses reptiles n’est pas un racontar de commère ; elle symbolise le compagnonnage de la bête et de l’homme résigné à la bestialité. Une part de l’âme du sorcier descendait en l’humble et fraternel camarade ; tuer l’un revenait parfois à exterminer l’autre, en tout cas à l’atteindre sûrement. Les Indiens de la province de Saint-Domingo concluaient des alliances avec les alligators des rivières et les créatures rampantes des forêts. Les anciens Égyptiens avaient toujours resserré les liens de l’animalité et de l’humanité, puisqu’ils imposèrent même à leurs dieux des formes bestiales. Le sorcier a résorbé en lui la poussière des vieux cultes ; aussi il remonte au delà des temps, s’inféode au chaos primaire des espèces.


Il existait, ces dernières années à Tullins près de Grenoble un spécimen caractéristique du moderne sorcier. Une bicoque, édifiée sur les ruines de l’arsenal des Dauphins abritait « le prophète Chavat » ; car la population lui

  1. Lire dans la Démonomanie de Bodin, le chapitre des Loups-garous, confirmé par les récits modernes des Corses et des Bretons.