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Page:Bois - Le Satanisme et la magie.djvu/316

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LE SATANISME ET LA MAGIE

un certain comte de Lautrec faisait don aux églises de statues pieuses qu’il maléficiait pour sataniser les fidèles. Et les récentes mésaventures du docteur Johannès n’ont-elles pas défrayé toutes les chroniques d’Europe et d’Amérique les années 1892 et 1893[1]?

Mais à l’envoûtement moderne, j’ai réservé un paragraphe spécial.

En fait, l’envoûtement pousse en branche sordide au grand arbre mystérieux des hétérodoxes cultes. Le paganisme le connut et le reconnut. Hécate et Cottyto étaient les déesses des envoûteuses. Le sabbat, après le triomphe du christianisme, perpétua, — de par le culte du Vieux Pan, réveillé du sépulchre et la présence stercoraire et formidable du Diable, synthèse des divinités mortes, — l’art des maléfices d’amour et de haine. L’envoûtement est bien sacré (sacer !), mais sacrilègement, horriblement. Il faut le considérer comme un rite religieux, célébré à la synagogue du Diable. Vous vous expliquerez alors sa continuité, sa terreur et même son efficacité. La sorcière du

  1. Les autres parties du monde n’ignorent pas non plus l’envoûtement. Le Père Charlevoix nous apprend qu’au xviiie siècle les Illinois fabriquaient des « marmousets » afin de hâter la mort de leurs ennemis. Le Père Mathias Garcia, dans sa Sixième lettre d’un voyage aux îles Marquises, narre l’astuce des sorciers du pays, emprisonnant dans une feuille d’arbre la salive et en même temps la volonté de celui dont ils tentent de devenir les maîtres. (Voir encore l’Histoire de l’Empire ottoman, par Briot.) Si je m’en rapporte à un article intitulé : La chasse aux bêtes paru dans la Revue des Deux-Mondes de janvier 1863, une nécromancienne de Bornéo extermina de fièvre et de langueur au moyen d’une effigie en cire qu’elle exposait au feu chaque matin. Récemment encore, en Chine, à Kouaï-Thao (province de Canton), on faisait périr à distance des hommes ou des femmes au moyen de statuettes de terre représentant des porcs, que l’on plaçait dans les maisons ou sur des tombes. Ces figures avaient reçu des bonzes une sorte de baptême. (Voir l’Intermédiaire des chercheurs et des curieux, réponse du Père Léon-Marie Guerrin, sous-procureur de la Grande-Chartreuse.) Le rite de l’envoûtement est bien universel.