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Page:Boisgobey - Rubis sur l'ongle, 1886.djvu/113

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— Je ne songeais point à le quitter, et je ne songeais pas non plus à l’avenir, lorsqu’un jour… c’était il y a trois ans… la supérieure me demanda si je me proposais de prendre le voile quand j’aurais l’âge d’entrer en religion. J’étais très pieuse, mais je ne me sentais pas assez de vocation pour m’engager à prononcer plus tard des vœux perpétuels et je le lui dis franchement. Elle me loua de ma sincérité, mais elle me déclara que j’arrivais à un âge où la communauté ne pourrait plus me garder et où il me fallait choisir un état. Je ne pouvais être qu’institutrice ou bien donner des leçons de chant et de musique. Or, il se trouvait précisément qu’une dame très respectable qui tenait un pensionnat de demoiselle à Saint-Mandé venait d’écrire à la supérieure de la Visitation pour lui demander si elle n’aurait pas parmi ses élèves une jeune fille qui fût en état de faire une sous-maîtresse et dont elle pourrait garantir la moralité. J’étais précisément cet oiseau rare. J’acceptai ce que notre Mère me proposait. Il m’eût été difficile de refuser. J’allais être obligée de quitter le couvent. Que serais-je devenue seule au monde, sans famille, sans appui, sans argent ?

— Quand je pense qu’à ce moment-là, j’étais à Rennes !

— Je n’en savais rien, dit en riant la jeune fille et alors même que je l’aurais su, vous ne supposez pas que je serais allée me mettre sous votre protection. Je partis, escortée par une Sœur qui me conduisit chez Mme Valbert, à Saint-Mandé. J’y fus reçue à merveille. Cette dame me plut beaucoup ; je lui plus aussi et j’entrai en fonctions. J’y suis restée un an.