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Page:Boisgobey - Rubis sur l'ongle, 1886.djvu/176

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de mer. Je te conseille donc de te tenir tranquille. Mais passons à un sujet plus positif… Tu viens de me dire que tu n’as pas trouvé ton usurier. Il faut lui écrire. Tu ne peux pas rester débiteur d’un pareil drôle. Et avant de t’en aller, tu vas me faire le plaisir de prendre l’argent que j’ai à te remettre pour dégager ta signature.

— Ce sera comme vous voudrez, mon colonel ; mais… j’aimerais autant le laisser chez vous jusqu’à ce que je sois sûr que cet usurier est prêt à le recevoir.

— Dis donc franchement que tu crains de le perdre… comme tu as perdu l’autre soir les dix mille francs de M. Lafitte. Je ne blâmerai pas ta prudence. J’espère que tu as tenu ta parole et que tu n’as pas touché chez l’agent de change.

— Je viens de rencontrer Gustave et je lui ai signifié que je lui abandonnais ma part de l’opération. Nous nous sommes même, à ce propos, définitivement brouillés.

— Je t’en fais mon compliment. Et maintenant que nous avons vidé toutes les questions à l’ordre du jour, nous pouvons déjeuner en paix. Ce ne sera pas long, car je n’ai à t’offrir que la classique omelette aux rognons et la côtelette de l’amitié.

— C’est plus qu’il n’en faut, mon colonel.

— Alors, tu n’as pas le royal appétit de ton père qui fut une des plus belles fourchettes de la Bretagne !… et quel buveur ! Ah ! les jeunes d’à présent ne valent pas les gens de ma génération. Mais tu fais bien de ne pas nous imiter. Tu crèverais à la peine.

Robert ne put s’empêcher de sourire en écoutant