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Page:Boisgobey - Rubis sur l'ongle, 1886.djvu/21

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le plaisir d’être auprès de vous. Je vous ai vu ce soir pour la première fois et il me semble que je vous connais depuis des années.

— Vous avouerai-je que j’éprouve la même impression, dit la jeune fille en refoulant ses larmes. Et pourtant je suis bien sûre que nous ne nous sommes jamais rencontrés.

— J’en suis sûr aussi, car si je vous avais vue, je ne vous aurais pas oubliée. Mais il y a déjà un lien entre nous… le nom de ma mère que vous avez entendu prononcer autrefois et que vous avez retenu. Évidemment, nous étions prédestinés à nous connaître un jour. Et je bénis mon ami Gustave qui m’a amené ce soir dans ce salon où de ma vie je n’avais mis les pieds.

— Et où vous ne reviendrez jamais, je suppose.

— C’était mon intention, il n’y a qu’un instant, mais j’ai déjà changé d’avis. Il m’en coûterait trop de ne pas vous revoir.

Mlle Violette rougit jusqu’aux oreilles et au lieu de répondre à ce commencement de déclaration, elle se mit à plaquer des accords sur le piano.

Robert s’aperçut qu’elle avait des mains charmantes, des mains de duchesse, fines et blanches avec des ongles roses et il reprit en baissant la voix :

— Je reviendrai pour vous, puisque je ne puis vous voir ailleurs que chez cette comtesse qui ne me plaît guère.

Cette fois, Violette pâlit, se redressa et répliqua, sans cesser de préluder :

— Pourquoi me parlez-vous ainsi ? je ne mérite pas que vous me traitiez comme si j’étais de celles