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Page:Boisgobey - Rubis sur l'ongle, 1886.djvu/214

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Mme de Malvoisine n’avait pas les mêmes raisons que sa fille pour détester M. de Mornac. Au contraire, elle le trouvait charmant, ayant toujours eu un faible pour les militaires, et si le colonel se fût avisé de lui faire la cour, elle ne lui aurait probablement pas été cruelle ; car elle admirait sa haute taille, son air martial et il lui plaisait surtout en sa qualité d’homme du vrai monde. Elle était fière de le recevoir chez elle où ses pareils ne venaient guère.

Elle n’eut donc garde de quitter la place, quand il s’approcha, et au lieu de battre en retraite dans le salon, elle s’avança pour lui sourire.

Marcandier connaissait le colonel pour l’avoir rencontré au théâtre. Et Marcandier n’était pas fâché du tout de l’occasion qui s’offrait à lui de s’aboucher avec ce défenseur de Violette et de savoir à quelle espèce d’homme les ennemis de la débutante allaient avoir affaire.

Il resta donc aussi, mais il se tint sur la réserve, comptant bien que la loquace comtesse allait se charger de faire parler M. de Mornac.

— Bonjour, chère madame, commença le colonel. Je ne m’attendais guère à la bonne fortune de vous trouver aujourd’hui sur mon chemin.

— Je suis venue voir un vieil ami à moi, dit la comtesse, en regardant Marcandier, qui s’inclina sans mot dire.

Elle s’abstint de le nommer, parce qu’elle ne se souciait pas de mettre le colonel en relations avec le principal agent du mystérieux oncle d’Herminie et aussi parce qu’elle ne jugeait pas que l’usurier méritât cet honneur.