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Page:Boisgobey - Rubis sur l'ongle, 1886.djvu/255

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visage, émacié par les privations et bouleversé par la frayeur.

— Ne me faites pas de mal, murmura-t-elle.

— Ne craignez rien. Je suis un ami répondit Bécherel.

Et comme elle ne bougeait pas, il la prit par la main pour l’aider à se remettre sur pied. Elle se laissa faire et, lorsqu’elle fut debout, adossée à la muraille, il put l’examiner à loisir, car elle resta immobile comme une statue. C’était évidemment la peur qui la pétrifiait ainsi. Elle regardait Bécherel avec des yeux si effarés qu’elle avait l’air d’une condamnée qui vient de voir apparaître le bourreau.

Elle était enveloppée dans un long vêtement de laine grossière, assez semblable à un froc de moine, une espèce de robe flottante qui lui montait jusqu’au cou et que dépassaient par le bas des pieds nus, chaussés de sandales en sparterie.

Sa tête n’était coiffée que d’une forêt de cheveux gris, emmêlés comme les brins de chanvre d’une quenouille.

Son visage avait la pâleur de la cire.

Elle avait dû être belle. Ses traits étaient réguliers et fins. Mais il était difficile de deviner son âge. À voir sa figure flétrie, on lui aurait donné soixante ans.

Peut-être était-elle beaucoup plus jeune.

La réclusion et les mauvais traitements vieillissent vite les prisonniers. Quand Latude sortit de la Bastille, on le prit pour un centenaire.

Bécherel cherchait à découvrir une ressemblance entre cette femme et Violette. Il n’en trouva au-