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Page:Boisgobey - Rubis sur l'ongle, 1886.djvu/279

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colonel, très répandu dans les cercles, n’avait pas peu contribué à répandre le bruit qu’une merveille inconnue allait se révéler sur une scène inférieure.

Les Fantaisies-Lyriques ne prétendaient pas à détrôner l’Opéra. C’était un petit théâtre qui avait eu ses jours de gloire sur l’ancien boulevard du Crime, où on pleurait jadis en écoutant des drames larmoyants, mais qui avait eu ensuite de grands revers.

Depuis sa création, on y jouait l’opérette, pas toujours avec succès. À la suite de quelques fours lamentables, la foule avait désappris le chemin de cette salle minuscule, mais elle ne demandait qu’à le reprendre, car l’opérette répond à un besoin du temps présent. C’est le café-concert, un peu plus relevé, et le café-concert est en pleine vogue.

Cochard, vieux routier d’entreprises dramatiques, s’était mis en tête de relever les Fantaisies, depuis qu’un généreux commanditaire l’appuyait de son argent, et s’il échouait, ce ne serait pas sa faute, car il n’avait pas ménagé ses peines.

M. de Mornac n’avait pas cru devoir lui dire pourquoi il s’intéressait à Mlle Thabor. Cochard ignorait l’existence de Robert de Bécherel. Cochard croyait que le colonel tenait uniquement à ne pas perdre cent mille francs engagés dans l’affaire. Cochard ne connaissait pas les dessous de la situation. Il avait bien entendu dire que des ennemis de sa nouvelle pensionnaire montaient une cabale contre elle, mais il comptait sur la bienveillance éclairée du public que le talent et la beauté d’une actrice disposent toujours favorablement.

Il comptait aussi sur son chef de claque.