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Page:Boisgobey - Rubis sur l'ongle, 1886.djvu/296

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Son costume, dessiné par Grévin, lui allait à merveille et quoiqu’il fût très décent, il mettait en lumière toutes ses beautés ; ses grands yeux brillaient sous un capuchon de velours noir ; un corsage, couleur de muraille, moulait sa taille svelte et une jupe suffisamment écourtée laissait voir, avec le bas de sa jambe fine, ses adorables petits pieds, chaussés de bottines grises dont les bouts figuraient de mignonnes griffes d’oiseau.

Elle était entrée dans l’esprit de son rôle, et conduite par le rossignol, elle s’avançait la tête basse, comme il convient à une fauvette débarquant sans passeport dur la terre étrangère.

Quand Vautour Ier demanda d’une voix nasillardes : « Que venez-vous faire dans mon royaume, jeunes étrangers ? », elle se redressa lentement et ses yeux illuminèrent la salle.

Le chef de claque n’eut pas besoin de donner le signal des applaudissements. Ils éclatèrent de tous les côtés à la fois, et du haut en bas, car le parterre aussi bien que les troisièmes galeries en prirent leur part. Et ils se prolongèrent si longtemps que Violette faillit en perdre contenance. Elle ne s’attendait pas à cette ovation et la joie la suffoquait.

Herminie était verte et Julia affectait de ricaner.

Robert savourait ce premier succès de son amie, mais ce n’était encore qu’un succès de beauté ; il le sentait bien et il se demandait avec anxiété quel effet allait produire la voix de Violette, cette voix douce et sonore qui lui remuait le cœur, quand elle lui parlait.

Elle avait deux ou trois phrases à dire avant de chanter, et elle les dit sans se troubler. Elle ex-