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Page:Boisgobey - Rubis sur l'ongle, 1886.djvu/89

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Gustave se leva, tendit la main au nouveau venu, l’entraîna derrière un arbre vert, planté dans une caisse, à deux pas de table et entama avec lui une conversation à voix basse.

Robert se mit à examiner le monsieur que son camarade accueillait avec tant d’empressement.

Ce nouveau venu était un blond, assez bien de figure, pas mal tourné et vêtu avec une élégance recherchée. À première vue, on aurait pu le prendre pour un homme du meilleur monde, mais en le regardant plus attentivement, Robert s’aperçut qu’il avait l’œil faux et une physionomie sournoise.

— Il a l’air d’un valet enrichi, pensa-t-il.

Le bellâtre s’éloigna et Robert entendit qu’il disait :

— Allez de l’avant et tapez ferme.

— Comme un sourd, répondit Gustave. Dites à votre patron qu’il peut compter sur moi.

Puis revenant à la table où Bécherel l’attendait :

— Avale vite ton café. Tu finiras ton cigare sous la colonnade. Les minutes valent de l’or, ce matin.

— Pourquoi ?

— Tu le verras tout à l’heure. Garçon, l’addition !

Et tout en réglant la note, Gustave reprit :

— Mon cher, nous allons écraser les cours. Tu ne sais pas ce que c’est. Eh bien ! tu vas l’apprendre et tu reconnaîtras que cet exercice est fatigant, mais lucratif.

Il se dirigea vers la sortie, et Robert qui le suivait de près, vit plusieurs messieurs l’accoster, successivement ; mais Gustave, sans s’arrêter, les éconduisit d’un geste qui signifiait : je ne sais rien ; ou : je ne veux rien dire.