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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/10

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pour des perſonnes dont je dois reſpecter la mémoire ; mais vous tenez à cette fantaiſie, vous m’en faites une loi de reconnoiſſance… Et bien, je me rends, duſſé-je vous ennuyer par la redite de mille choſes que vous ſavez déjà, & que l’ordre de la narration ne me permettra pas d’omettre.

M. de Tournemont, né dans la haute Finance, entra au ſervice dès ſa plus tendre jeuneſſe. La nature même l’avoit ſi bien deſtiné pour cet état, qu’il parvint aux grades les plus honorables, ſans qu’on pût attribuer ſon avancement à la faveur.

Auſſi-tôt qu’il s’y fut fait un nom, ſon pere, dont il étoit l’unique héritier, deſira de lui procurer une grande alliance. Mademoiſelle de Balzine, accordée au prix de l’or, apporta en dot une ame de glace, un eſprit de feu, beaucoup d’orgueil, autant de beauté, joints à une paſſion ſi forte de dominer, qu’elle la rendoit capable d’y ſacrifier toutes les autres.

Premier fruit de ce mariage, je fus d’abord regardée par ma mere comme une poupée dont elle s’amuſoit ; mais une poupée n’étoit pas faite pour captiver l’attention d’une jeune femme avide de plaiſir, & livrée à la diſſipation.

Abandonnée, ſelon l’uſage, aux ſoins des domeſtiques, je reçus, dans cette école, les