Aller au contenu

Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/108

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 104 )

d’où j’étois partie lorſqu’il avoit été mention de nous unir. Delà juſqu’à l’amour, il y avoit bien de la diſtance ! j’étois perſuadée que je ne la franchirois jamais ; Murville en penſoit autrement. Peu d’eſtime pour les femmes, & beaucoup pour lui-même, rendoit ſa confiance audacieuſe. Il s’étoit promis de me faire démentir de ma froideur, & ſon ingénieuſe vanité dirigeoit toutes ſes actions vers ce but.

Le moment redouté s’approchoit. Ma mere & le Chevalier avoient fait quelques voyages à Paris pour les préparatifs néceſſaires. On ne me conſultoit ſur rien : cela m’étoit égal. J’étois comme une victime qu’on va conduire à l’autel, ſans qu’elle s’occupe des fleurs qui doivent la couronner.

Nous étions à trois jours de notre départ, à huit de mon mariage, quand différents ſymptômes, dont je fus attaquée, annoncerent une maladie ſérieuſe. Les progrès furent rapides ; la fievre devint ardente ; la malignité ſe manifeſta bientôt après.

La ſaiſon n’étoit plus belle, la maiſon ceſſoit d’être gaie ; toute la compagnie prétexta des affaires pour nous quitter. Le Marquis de Rozane, par pitié ; ma mere, par décence ; Murville, par politique, ſe déciderent à demeurer.

Je paſſai plus de ſix ſemaines dans un dan-