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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/109

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ger continuel. Jamais cette cruelle maladie ne s’étoit montrée plus opiniâtre, ni accompagnée d’accidents plus compliqués. Mon délire ſur-tout étoit affreux, & ne me laiſſoit que de très-courts intervalles.

Chaque fois que la raiſon me revenoit, mes yeux tomboient ſur Murville, qui ſembloit attaché près de mon lit. Son aſſiduité, ſon empreſſement à me ſervir, la négligence de ſa parure, certain air conſterné que je ne lui avois jamais vu, me toucherent, me le rendirent intéreſſant : c’étoit tout ce que j’étois capable de ſentir dans une pareille ſituation.

Enfin, les accidents ceſſerent, la fievre tomba, on ne craignit plus pour ma vie ; mais il me reſta une telle foibleſſe, que pendant aſſez long-temps la moindre agitation me faiſoit évanouir. J’avois perdu l’uſage de mes jambes ; ma poitrine paroiſſoit affectée… Les Médecins arrêterent qu’on me laiſſeroit à la campagne, pour y reſpirer un air plus pur, & jouir des premieres influences du printemps, dont nous approchions. Les beſoins de la convaleſcence tiennent plus à l’ame que ceux de la maladie ; ils ſont moins preſſants, mais plus étendus : c’eſt le regne des fantaiſies, des petites tyrannies, des délicateſſes puériles : c’eſt la vraie pierre de touche pour la complaiſance