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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/116

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charme de ſon eſprit, & de ſon enjouement. Quelle différence entre ce léger météore, & la flamme vive que le Comte avoit allumée dans mon ame ! quoiqu’elle eût déja perdu de ſon activité, elle me tourmentoit ſans ceſſe. Je me retraçois les ſcenes tendres que j’avois eues avec lui, particuliérement celle du Couvent de ***. Plus je me faiſois d’efforts pour éviter ces douloureux ſouvenirs, plus ils devenoient opiniâtres.

Des combats ſi fréquents, ſi pénibles, la mélancolie qui s’enſuivoit, mettoient un obſtacle continuel au rétabliſſement de ma ſanté.

Sans diſſipation, ſans autre reſſource que la tante du Baron, bonne, ſage, il eſt vrai, mais âgée, ſérieuſe & dévote, il falloit en périr, ou trouver le moyen de ſe procurer quelque dédommagement.

J’imaginai qu’après m’être ſacrifiée aux volontés de ma mere, elle ne me refuſeroit pas la ſatisfaction d’avoir ma ſœur, ne ſût-ce que pour le temps où je devois être ſeule à la campagne ; cette penſée devint bientôt un deſir très-ardent. Mon mentor, à qui je la communiquai, la déſapprouva, ſans en dire la raiſon ; j’en fus ſurpriſe, fâchée… Je la crus jalouſe, & réſolus de ſuivre mon projet, ſans lui en parler davantage.