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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/125

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qui ne s’étoit pas encore fait ſentir entre nous. Je crus n’avoir jamais rien tant aimé que Murville, & le lui témoignai d’une maniere ingénue, à laquelle il parut mettre un grand prix.

Il fallut aller, ſelon l’uſage, aux ſpectacles, aux promenades, chez le monde entier, faire trophée de mon nouvel état. Le Baron m’accompagnoit par-tout, & par-tout il ajoutoit à mon triomphe, à ma ſatisfaction… La tête m’en tournoit.

Preſque toutes les jeunes perſonnes débutent, dans le mariage, entourées de preſtiges éblouiſſants. La nouveauté des objets, le beſoin d’aimer, la ſéduction des ſens, le tourbillon des plaiſirs, l’attrait de la propriété, la chimere de l’indépendance, les jettent dans une douce ivreſſe, d’où il réſulte ordinairement un goût très-vif pour celui qui leur procure cette délicieuſe exiſtence.

J’éprouvois, comme les autres, l’effet de ces illuſions, quand je me rappellai que j’avois une ſœur, envers laquelle il me reſtoit des devoirs à remplir. Qui que ce fût ne m’en avoit fait ſouvenir, & je n’étois pas en droit d’en faire des reproches.

Murville, occupé de je ne ſais quoi, ſe diſpenſa d’être de la partie. Ma mere s’offrit à me conduire au Couvent. Peu m’im-