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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/126

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portoit qui j’aurois pour ſecond dans cette viſite, pourvu que j’évitaſſe le tête-à-tête avec Mademoiſelle d’Aulnai. Je redoutois un examen, une explication ; enfin, d’avoir à rougir du bonheur dont je jouiſſois.

Je mis dans ma parure toute la recherche imaginable, perſuadée que cet article entre pour beaucoup dans l’opinion qu’on prend à la grille, de la félicité d’une femme.

A ce ſoin frivole, j’ajoutai celui de porter pluſieurs bijoux, que j’arrangeois dans une boîte, lorſque ma mere arriva. A qui deſtinez-vous ces préſents ? me demanda-t-elle. — A ma ſœur. — N’en prenez pas la peine : ces bijoux ne peuvent plus lui convenir. — Comment ? pourquoi ne lui conviendroient-ils plus ? Il faut, reprit Madame de Rozane, que vous ſachiez une choſe dont j’ai jugé à propos de vous faire un ſecret. Vous allez voir Mademoiſelle d’Aulnai bien différente de ce que vous l’avez laiſſée… Ce n’eſt plus cette fille hautaine, décidée, qui ne reſpiroit que la liberté ; c’eſt une humble & fervente novice, déjà revêtue de l’habit religieux. O Ciel ! m’écriai-je, ma ſœur novice ! ma ſœur Religieuſe ! Eh ! vous exigez d’elle cet affreux ſacrifice ? Qu’eſt-ce à dire ? demanda fiérement la Marquiſe. Vous êtes bien téméraire d’oſer me mettre dans le cas de me juſtifier auprès de vous !