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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/144

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nomme bien, au regard du monde. J’étois libre autant & plus qu’il ne convenoit à une femme de mon âge. Une grande fortune, dont nous uſions noblement, nous donnoit l’apparence de la félicité. Je n’avois point d’amant connu, Murville point de maîtreſſe affichée, & qui que ce fût n’étoit informé de nos démêlés ſecrets.

Mon bonheur étoit dans un ébranlement qui le menaçoit de ſa ruine, quand le temps de la profeſſion de ma ſœur arriva. Elle ſe fit avec pompe ; l’aſſemblée fut brillante ; le ſeul Murville ne s’y trouva pas. Des affaires l’avoient appellé à la campagne pluſieurs jours auparavant.

J’avois bien vu des cérémonies pareilles à celle qui m’attiroit au Couvent de *** ; mais la perſonne qui s’alloit immoler, mettoit ce redoutable ſpectacle dans un nouveau jour.

Ces tableaux, ſi étrangers au ſiecle & au caractere de ma ſœur, que préſentoit un Orateur pathétique ; ces eſpeces d’ombres qui environnoient la victime, & dont elle alloit groſſir le Catalogue ; ces vœux terribles, diſtinctement prononcés, me cauſerent une ſi forte révolution, que je fus prête à m’évanouir.

On vint à moi ; il ſe fit un petit tumulte… Rien n’altéra le calme qui regnoit ſur