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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/193

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puiſque ſa perce me frappa comme la deſtruction de l’univers. Une eſpece de ſtupidité abſorba toutes mes puiſſances… A cet état ſuccéderent des tranſports… que je n’oſe caractériſer… Je voulois, bravant toute crainte, tout reſpect humain, quitter le Couvent, aller chercher Murville, lui percer le cœur… fût-ce dans vos bras ; porter le poignard tout ſanglant à ma mere, l’accabler des reproches que me ſuggéreroit ma fureur, & me punir à ſes yeux des crimes où ſa dureté m’auroit conduite. Je crus alors déteſter le perfide… J’en triomphai… Que ce triomphe fut court ! Les feux de la colere un peu calmés, ceux de ma paſſion ſe ralumerent, & devinrent plus violents qu’ils n’avoient encore été. Je ne la combattis point, je ne defini même pas d’en être délivrée… Malgré les tourments qu’elle me faiſoit ſouffrir, elle m’étoit chere : ſon extinction m’auroit paru un véritable anéantiſſement.

„ Cette tendre diſpoſition, jointe à la lecture réitérée de la lettre de Murville, me firent inſenſiblement adopter ſes excuſes. Je me le repréſentai malheureux comme moi, pour moi, éprouvant toutes les répugnances d’une union mal aſſortie… Pénétrée de ſon ſort, je me fis une gloire