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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/192

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probablement, aime ailleurs… Voilà l’extrémité où m’a réduit le délabrement de mes affaires. J’étois ruiné : Madame de Rozane le ſavoit ; elle daignoit venir à mon ſecours par un mariage avantageux : mais il falloit s’exécuter, s’immoler, renoncer à ſon plus doux penchant… Je l’ai fait, & ne mérite, en cela, que votre pitié.

„ Depuis une heure, à peine, je me ſuis chargé de fers, & dans une heure, au plus, je partirai pour la Province, où des intérêts preſſants m’appellent…

„ C’en eſt fait ! le plus beau de mes ſonges eſt fini, & les regrets qui m’en reſtent doivent ſe renfermer dans mon cœur pour n’en ſortir jamais. Ce n’eſt plus un amant paſſionné, c’eſt un frere, un tendre ami, que vous devez trouver en moi. Prenons, l’un & l’autre, des ſentiments conformes à notre ſituation préſente : la raiſon le preſcrit, notre repos l’exige, & j’en attends de vous l’exemple… Quel conſeil je vous donne ! combien il me coûte ! mais qu’il eſt néceſſaire… Ah ! ma ſœur !… que ce nom, qui devroit m’être ſi doux, répand d’amertume dans mon ame !… Adieu.

„ Sans doute j’avois été ſoutenue juſques-là par un eſpoir imperceptible,