Aller au contenu

Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme vol2.djvu/127

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 36 )

agréer ſes excuſes pour le rendez-vous de Jeudi matin, où il ne pourra pas ſe trouver, & le ſacrifice qu’il fait à ſa tranquillité, des lettres précieuſes qu’il en avoit reçues. Le ſouvenir des bontés de la belle Comteſſe, le ſuivra au-delà des mers, & rien n’affoiblira dans ſon cœur les ſentiments pleins de reſpects qu’il lui a voués.

Cette lettre me fit ſentir à quel point j’avois été jouée, trahie, priſe pour dupe. Je chargeai Cardonne & ſa maîtreſſe de mille & mille imprécations. Je déchirai le papier, j’en rejettai les morceaux avec horreur… La colere me tranſportoit, me ſuffoquoit, me faiſoit perdre le ſens.

Au milieu de ces convulſions, je ramenai machinalement mes yeux ſur les lettres, entre leſquelles j’en reconnus une de la main du Comte : lui m’écrire, à propos de quoi ? Je venois de le voir… Etoit-ce pour m’annoncer quelque choſe de plus fâcheux encore que ce qu’il m’avoit dit ?… Le feu de la colere fit ſubitement place au froid de la crainte. Tremblante, diſtinguant à peine les caracteres, je lus mon arrêt, non ſans interruption.