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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme vol2.djvu/140

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fonde, qui pût me cacher à tous les regards. Le plus court, le plus honnête, auroit été de me mettre dans un couvent : je n’y penſai pas, ou j’en éloignai l’idée, parce que je le haïſſois. Monſieur de Rozane opinoit à me le conſeiller, ma mere à m’y contraindre ; mon mari s’y refuſa. “ Je ne l’ai pas épouſée pour en faire une eſclave, diſoit-il dans une lettre que j’ai vue depuis. Dût-on m’accuſer d’un excès d’indulgence, elle jouira toute ma vie d’une entiere liberté… Elle a détruit mon bonheur… N’importe, je reſpecterai le ſien, & ne lui donnerai jamais ſujet de me nommer ſon tyran… „

Ma famille, retenue par la volonté de mon mari, me laiſſa décider moi-même de mon ſort, & cette déciſion fut l’ouvrage de quelques heures. Ne pouvant pas mourir, comme je l’avois deſiré, ne voulant point reſter dans les environs de la Capitale, ne connoiſſant aucun autre lieu du monde, j’optai pour un château qui m’appartenoit en Bourgogne, par la ſeule raiſon que j’en avois entendu parler comme d’une Thébaïde.

De la même maniere, avec la même précipitation que j’avois quitté Paris, je me mis en marche pour la Bourgogne, par un temps affreux, des chemins perdus, traî-