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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme vol2.djvu/139

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cette démarche ? Un travers de plus n’étoit pas un encouragement à retourner en arriere… Je ne me ſentois ni la force de ſoutenir le genre de vie que je menois, ni la faculté d’en choiſir un autre… Jamais je n’avois eu un ſi grand beſoin de conſeil, & jamais je ne m’étois trouvée moins à portée d’en demander… Pluſieurs jours ſe paſſerent dans cette pénible incertitude… La ſeconde lettre de Marcelle renverſa le peu de raiſon qui me reſtoit.

Madame d’Archenes s’étoit fait un jeu cruel de raconter mon hiſtoire ; elle avoit circulé, fermenté, groſſi dans ſes circonſtances, & venoit de faire éclat ; on l’appuyoit de ma retraite, de celle du Comte ; on rappelloit la mort de Murville, & les ſoupçons auxquels elle avoit donné lieu… Ma mere ſavoit tout, en étoit furieuſe ; le Marquis conſterné ; ma famille troublée, humiliée ; mes amis intimidés, n’oſoient ou ne vouloient point eſſayer de me défendre.

J’avois bien de l’étourderie, bien de l’inconſéquence, mais non encore la doſe d’impudence néceſſaire pour faire face à ce nouveau malheur. Le mépris public étoit un poids qui m’écraſoit… Je paſſai deux jours ſans prendre de nourriture, ſans me livrer au ſommeil… Je voulois mourir, ou du moins m’enfoncer dans une ſolitude pro-