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amants prêts à s’unir, la déchiroient. Je me repliais ſur moi-même pour conſidérer à quel point j’aurois été heureuſe, ſi j’avois ſu l’être ; il s’enſuivoit des accès d’amour, & de regret, pour mon mari, qui me jettoient dans la plus noire, dans la plus profonde mélancolie.

L’éloignement de ma fille, ajouta encore à mes dégoûts, à mes langueurs : je l’aimois avec ſi peu de modération, que je crus voir rompre les liens de ma vie, quand Mademoiſelle des Salles l’arracha de mes bras, pour la conduire dans un Couvent. Il me fut permis de le choiſir à Autun ; & quelque averſion que j’en euſſe, je l’y aurois accompagnée, ſi les ordres de Rozane n’avoient été poſitifs au contraire : mon influence ſur l’éducation de cet enfant, étant préciſément ce qu’il vouloit éviter.

Dès mes premieres converſations avec Mademoifelle des Salles, je reconnus qu’elle n’étoit pas inſtruite des motifs de ma rupture avec le Comte, & que je pouvois tirer parti de ſon ignorance, pour la mettre dans mes intérêts ; ce fut à quoi je travaillai ſans retardement. L’aveu ménagé de mes imprudences, la vive apologie de mes intentions, de mes ſentiments, des larmes touchantes, des plaintes modérées ſur l’extrême ſévérité de mon mari, placées adroi-