Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme vol2.djvu/153

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 62 )

te, je répugnois à l’idée de m’offrir à ſes yeux, ſans qu’il y fût préparé… Soupçonnant d’ailleurs de l’exagération dans l’expoſé de Madame de Rozane ſur ſa ſanté, je tergiverſai, je fis des objections ; ma mere s’indigna… Quoi ! dit-elle, quand votre mari ſe meurt, quand vous avez à vous en accuſer, la crainte d’une humiliation méritée, vous fait balancer de voler à ſon ſecours ! Ah ! qu’il vous connoît bien !… Comme il ſait apprécier ce que vous avez fait juſqu’à préſent pour le rappeller !

Jugeant ſur cette derniere phraſe, qu’il avoit parlé de moi, j’en fis très-timidement la queſtion ; aſſurément, dit la Marquiſe, le bon ordre de ma famille exigeoit que je fiſſe, en cette conjoncture, une nouvelle tentative pour votre réunion. Eh ! Rozane a ſans doute continué de s’y refuſer, demandai-je ? — A peu près… il le devoit, en partant, de ſa façon de penſer ſur votre compte. — Quelle eſt-elle donc cette malheureuſe façon de penſer qui me ferme toutes les avenues de ſon cœur ? — La voilà : il vous croit & très-heureuſe ſans lui, & très-indifférente pour lui. Il eſt perſuadé qu’en ſollicitant ſon retour, vous ſacrifiez uniquement à la décence, & qu’il vous puniroit en acquieſçant à ce que vous ſemblez ſouhaiter… Ne vous récriez point, inter-