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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme vol2.djvu/173

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raciner de mon ame ; tu vas m’enrichir des vertus contraires : elles te forceront à me rendre ta tendreſſe, à chérir les liens que nous allons reſſerrer pour toujours… Mon ami, penſe donc que notre printemps finit à peine, & qu’une longue carriere de bonheur peut encore s’ouvrir pour nous…

Pendant que je parlois, l’agitation du Comte augmentoit par degré, je le ſentois à ſes mains, que je tenois dans les miennes… Un froid extraordinaire s’y gliſſa… Quelle image !… Quelles chimeres ! dit-il, d’une voix baſſe & tremblante… La cruelle ! en quel temps elle vient m’offrir… Ses yeux ſe fermerent ; ſa tête ſe pencha… Je le crus mort. Mes cris appellerent du ſecours ; on le mit au lit, on lui redonna la connoiſſance ; mais il reſta dans une foibleſſe exceſſive.

Sans le lui dire, j’envoyai chercher le Médecin le plus proche. Il parut ſurpris, même fâché de le voir : cependant il ne refuſa point de l’entretenir, à condition que je m’éloignerois.

En me retirant, je remarquai une porte vitrée qui touchoit preſque au lit du Comte, & derriere laquelle on pouvoit aiſément s’introduire : je m’y rendis, dès que je fus ſûre de n’être obſervée de perſonne…

Si je conſervois quelque eſpoir, je me ſoumettrois volontiers à vos ordonnances,