Aller au contenu

Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme vol2.djvu/18

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 13 )

bre… Où voulez-vous aller, me demanda-t-il ? Où vous ne ſerez pas, répondis-je, en cherchant à paſſer outre. Et bien, Madame, rentrez, je vais m’éloigner ; mais ne vous montrez pas à vos gens dans le déſordre où vous êtes : ce ſont leurs obſervations qu’il faut éviter ſur toutes choſes ; c’étoit aſſurément ce qui m’inquiétoit fort peu ; j’aurois voulu au contraire faire retentir mes clameurs, pour jetter ſur Murville tout l’odieux de la circonſtance. Il le comprit à quelques mots qui m’échapperent, ſe tint ferme, & m’obligea de rentrer dans le cabinet, dont je fermai la porte avec autant de précaution que ſi j’avois été pourſuivie par un aſſaſſin.

Je ne me reconnus dans le labyrinthe où j’étois égarée, que pour enviſager toute l’horreur de mon ſort. Qu’il me parut affreux ! J’étois accablée ſous le poids des chaînes qui m’attachoient à Murville… L’eſpece de menace qu’il m’avoit faite, me tranſportoit de colere : il l’avoit rendue conditionnelle ; je la ſuppoſois abſolue, parce qu’il ſeroit toujours le maître de trouver des prétextes à ſon exécution.

Cependant, par une inconſéquence ſinguliere, nul ſentiment de crainte ne ſe fit jour dans mon ame. Aveuglée par mon indignation, j’aurois regardé comme une baſſeſſe de