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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme vol2.djvu/22

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joug qu’on m’obligeoit de porter ?… Plût-à-Dieu qu’elle eût obtenu ce qu’elle deſiroit ! je ne ſerois pas aujourd’hui plongée dans une affreuſe déſolation… Mais ma deſtinée eſt de ſouffrir de mes propres maux, & de l’injuſtice des autres ; de n’inſpirer, quelque choſe que je faſſe, que des ſentiments d’averſion, de fureur, de mépris… ou tout au plus de compaſſion.

Je pleurois, le Comte avoit la tête appuyée ſur ſa main, de maniere qu’elle me cachoit entiérement ſon viſage… Nous reſtâmes ainſi quelques minutes ſans parler…

Il eſt bien cruel, reprit-il, d’avoir détruit des illuſions auxquelles vous attachiez votre bonheur. Mon bonheur ! lui dis-je. Ah ! je n’en ai jamais eu qu’en eſpérance : on m’a forcée d’y renoncer pour toujours… Mais qui donc a eu l’imprudence de vous communiquer cette lettre, demanda-t-il encore, ſans paroître faire attention à ce qui venoit de m’échapper ? Une perſonne qui n’en ſavoit pas le contenu, répondis-je. Alors, reprenant ma narration de plus haut, je détaillai tout ce qui s’étoit fait & dit, depuis le moment où la Touriere étoit venue chez Madame de Rozane, & ne paſſai ſous ſilence que ce qu’il y avoit eu de relatif au Comte dans ma diſpute avec Murville.

Pluſieurs fois mes ſanglots avoient inter-